Quand le souvenir s’estompe

Face au bois de Hem (Somme), en prenant la D146 vers Maurepas, qui remarque encore à l’entrée de l’aire de repos, la petite stèle élevée à  la mémoire d’un soldat tué dans le secteur.  Le temps et les éléments ont rongé la croix qui surmontait la pierre et l’on a peine à lire les initiales ainsi que la date qui y sont gravées :

H.R – 12 août 1916

Grâce au travail extraordinaire des bénévoles de MemorialGenweb, nous avons déjà pu consulter la liste des hommes inhumés dans les nécropoles du secteur. Et parmi ceux ayant été tuéz le 12 avril 1916 et dont le prénom commence par H, le patronyme par R. Il n’y en a aucun.

Cependant, il y a un homme du 170e R.I qui pourrait correspondre au soldat recherché, il est inhumé dans la nécropole du Bois des Ouvrages à Cléry-sur-Somme. Il s’agit du 2e cl. Henri Joseph Rayssiquier né le 1er août 1885 à Praidal dans l’Hérault. Matricule 552 au recrutement de Béziers. Au moment de la mobilisation, il demeurait à Vendres où son acte de décès a été transcrit en date du 9 octobre 1916.

Une rapide recherche dans les JMO nous apprend que le 170e R.I. combattait effectivement dans le secteur de Cléry en août 1916. Lors des combats du 12 ce régiment a perdu là 54 de ses hommes. Alors si la fiche de notre soldat mentionne la date du 13 avril, il se peut qu’il s’agisse d’une erreur de transcription.

Avons-nous pour autant retrouvé le soldat dont la mémoire s’efface lentement ?

Nous ne sommes pas en mesure de l’affirmer, il nous faut encore poursuivre et affiner les recherches. En attendant, dans l’esprit qui anime l’association, nous allons contacter les autorités compétentes afin que ce petit monument puisse un jour être rénové et ainsi perpétuer la mémoire de ce soldat.

Félix COLIN – 26e R.I

Emouvante découverté au dos de l’avis de décès de ce soldat tué dans notre secteur de Fricour. En effet, on peut y lire un extrait de la lettre écrite à ses proches deux jours avant d’être tué. :

« ….Je me demande comment j’ai pu sortir du guêpier où nous étions fourrés, c’est que Dieu n’a pas jugé à propos de me rappeler à lui, espérons-le jusqu’au bout et que, du haut du Ciel, notre cher Papa veillera sur nous tous.  Prions beaucoup Notre-Dame de Bonsecours, ayons confiance en Dieu, et remettons-nous entre ses mains, lui seul peut nous garder, et s’il nous sépare ici-bas, il nous réunira là-haut, loin des maux de cette misérable vie, car je suis prêt à paraître devant Dieu et vous penserez que votre grand est mort en défendant sa Patrie. A la grâce de Dieu, et si je meurs ma dernière pensée sera pour vous. Mais au revoir, espérons quand même. »

Félix Colin est né à Blâmont (Meurthe et Moselle) le 28 janvier 1893. Le 25 septembre 1914 il se trouve dans la Somme avec son régiment. L’historique du régiment nous éclaire sur les circonstances du décès de ce soldat. Nous y apprenons également que le 26e R.I. a subi d’importantes pertes durant les combats des 25 et 26 décembre du côté du bois Olimpe (au sud de Cappy), de Dompierre et d’Herbécourt. Pour les compenser, le 27 septembre un renfort de réserviste arrivera en pleine bataille à Cappy et à Eclusier. Est-ce à ces combats meurtriers que Félix Colin fait référence quand il parle du guêpier dans lequel ils se sont retrouvés ?

Ce même 27 septembre la bataille est féroce du côté des 14e et 43e Coloniaux (Curlu, Maricourt) et dans la soirée le 26e R.I. reçoit l’ordre de repasser au nord de la Somme où il est placé en réserve dans la région d’Etinehem et dans celle de Bécordel.

Dans l’après-midi du 29, il est mis à la disposition de la 11e Division et se porte à l’attaque de Fricourt. Mais le villages, qui est puissamment défendu par les Allemands, ne peut être approché qu’à la nuit tombante. Et c’est à la lueur des incendies que le régiment s’emparera de la partie sud du village. L’historique parle d’une région en proie aux flammes. Albert, Fricourt et Mametz sont en feu !

Pour conquérir Fricourt, certaines compagnies mènent des charges à la baïonnette (la 3e du Lt Balicourt, la 6e du Lt Mettevant et la 7e du Lt Baillant). Attaquant par l’Est, elles parviennent à la lisière Nord du village jusque dans les vergers. Cependant, les Allemands ayant reçu des renforts, contre-attaquent. La lutte pour la possession du village se poursuivra toute la nuit à coups d’attaques et de contre-attaques. Ce combat a lieu dans un village dont les soldats français ne connaissent pas le plan et qui, de plus, n’a pu être approché que de nuit. La lutte est confuse dans Fricourt et en dépit d’une belle résistance, ceux qui étaient parvunus à sa lisière Nord doivent se replier. Les pertes sont lourdes. Mais le 26e s’installe solidement au Sud du village.

Au matin du 30 septembre, fusillades et canonnades reprennent de plus belle. La lutte est âpre dans Fricourt où l’on se bat de maisons en maisons. A l’Ouest comme à l’Est, on lutte pour l’investissement du village auquel les Allemands se maintiendront jusqu’au 2 juillet 1916. Cependant le Sud du village restera au mains des Français jusqu’à leur relève, en août 1915, par les troupes britanniques.

C’est donc au cours de ces combat acharnés du 30 septembre que le soldat Félix Colin sera tué. Son décès ayant fait l’objet d’un jugement déclaratif, il semblerait que son corps n’ait pas été retrouvé.

François BIDEAU – 118e R.I

François Bideau est né le 3 février à Trévou-Tréguignec dans les Côtes d’Armor. Il était, jusque il y a peu, considéré comme « disparu » à l’âge de 28 ans lors des combats de La Boisselle du 27 décembre 1914.  Mais aujourd’hui on peut biffer de sa fiche de décès la mention « disparu » puisque ses restes ont été récemment retrouvés lors des travaux de fouilles organisés par l’équipe britannique du La Boiselle Study Group.

Dans un des articles de leur blog, le groupe relate les circonstances de la découverte, mais également celles qui ont conduit à la mort de ce soldat. Plusieurs photos y sont associées.

Lien vers l’article : http://www.laboisselleproject.com/fr/2012/05/24/discovery-of-two-french-soldiers-2

La photo de François Bideau a été envoyée à l’un de nos membres fondateurs par la mairie de Trevou et publiée ici avec l’aimable autorisation de l’arrière petite-fille du soldat.