Sur les traces des soldats français dans la Somme

Le 4 juillet dernier a eut lieu, à l’initiative de notre petit groupe de passionnés (1) et dans le cadre des marches du club des randonneurs du pays du coquelicot, la première marche du souvenir jamais organisée dans le secteur de La Boisselle à Maricourt.

Le but de cette marche était de raviver la mémoire des soldats français qui se sont battus dans ce secteur avant leur relève par les soldats britanniques.

Qu’on me comprenne bien, le sacrifice des soldats du Commonwealth ne s’effacera jamais notre mémoire, sacrifice qui nous touche d’autant plus que leurs régiments ont côtoyé ceux de nos aïeux. En effet ces derniers ont été, pour certains, relevés au mois d’août 1915 par les troupes britanniques tandis que d’autres ont participé à leurs côtés à la grande offensive du 1er juillet 1916.

Il faut aussi rappeler que dans ce secteur beaucoup de soldats britanniques tués au combat ont partagé avec leurs compagnons français les mêmes lieux de sépultures. Ceci jusqu’à ce que les dépouilles françaises soient transférées dans les nécropoles nationales de la région.

Ce fut notamment le cas au point 71-110 dans le secteur qui fait face aux villages de Fricourt et Mametz, et c’est toujours le cas dans le cimetière britannique d’Ovillers où 129 soldats français, appartenant notamment aux 19e, 410e et 403e Régiment d’Infanterie, partagent la dernière demeure de leurs compagnons du Commonwealth.

Mais force est de reconnaître que dans la Somme l’histoire des Britanniques efface peu à peu celle de nos soldats comme l’a rappelé très justement Mr André Belle dans cet article que nous a consacré le « Courrier Picard »

Il ne faudrait pas oublier que ce sont les soldats français qui ont subit le choc lors de l’avancée allemande dans la Somme et sur Paris et que leur sacrifice a permis de stabiliser le front à cet endroit.

Annoncée dans les pages de ce journal et de celui du Pays du Coquelicot, cette première marche a connu un certain succès et les échos qui nous en sont parvenus nous encourage à poursuivre. Car cette marche n’est que le premier jalons posé pour faire revivre le souvenir des soldats français dans ce secteur de la Somme.

La marche a débuté par une visite au calvaire breton élevé à la mémoire des soldats du 19e qui ont payé un lourd tribu dans le secteur et notamment lors de l’attaque du 17 décembre 1914. Une évocation de leur histoire a été présentée par Claudie Llewellyn.

Cette évocation a été suivie d’un dépôt de gerbe (2) par deux descendants de poilus,l’un Breton, l’autre Normand. Après quoi on observa une minute de silence.

Après quoi le petit groupe rejoint « L’îlot » où le 19e R.I. eut à subir la guerre des mines comme évoqué dans les pages du blog que Sophie Carluer a consacré à ce régiment ICI

 

A La Boisselle, sous la direction de Mme Llewellyn ( propriétaire des lieux), le groupe s’apprête à faire le tour de l’endroit dénommé « L’îlot » par les Français et « Glory Hole » par les Britanniques.

Ce haut lieu de mémoire garde toujours les stigmates des combats et de la guerre des mines

Ci-dessous une photo du secteur prise à l’époque depuis les tranchées allemandes.

La marche s’est poursuivie vers le Château de Bécourt où fut évoqué le 26e Régiment d’Infanterie. Le groupe de marcheurs s’est ensuite dirigé vers la gare de Fricourt. Puis, en suivant la ligne des anciennes tranchées, vers le lieu-dit « Bois Français » où le groupe s’est recueilli sur la tombe du soldat Thomassin dont Madame Llewellyn a évoqué la mémoire.

Cette tombe fut très longtemps entretenue par l’oncle de notre ami André Belle.
A noter que l’année de décès qui figure sur la tombe(1916) est inexacte. Le soldat François, Henri Thomassin a en effet été tué le 30 septembre 1914 alors qu’il allait délivrer un message dans le secteur du lieu-dit « Bois français ».

Le lieu-dit « Bois français » (qui fait aujourd’hui partie du Bois d’Engremont) conserve lui aussi de nombreuses traces des tranchées et de la guerre des mines.

Le bois d’Engremont vu depuis le site du « Tambour Duclos ».

Dans le sol bouleversé d’un terrain adjacent (propriété privée), les stigmates sont encore plus visibles…

 

Un boyau de communication

 

Le terrain bouleversé par les explosions de mines et autres obus

C’est aussi de cet endroit que s’est élancée, le 19 juillet 1915, la 6e compagnie du 403e R.I. commandée par le capitaine Page et à laquelle appartenait l’escouade de notre aïeul, Henri Autin. Le capitaine Page, le sergent-fourrier Garetta, le caporal Autin ainsi que 39 de leurs compagnons ont été tués (3). Les corps des deux derniers n’ont jamais été retrouvés ainsi qu’une dizaine d’autres.

Retour ensuite sur le chemin qui suit presque exactement le tracé de la tranchée Albert 1er baptisée ainsi par les poilus en hommage au Roi des Belges.

C’est par ce chemin de terre que le groupe de marcheurs se dirige vers Carnoy.

Ci-dessus on peut voir, sur la gauche de la route qui descend vers le village, ce qui apparaît comme de simples affaissements de terrain et qui sont en réalité les traces laissées par les abris dans lesquels les poilus allaient prendre un peu de repos.

Dans ce village on trouve aussi le cimetière britannique dans lequel repose leCapitaine Nevill un des héros de l’attaque du 1er juillet.

A midi le groupe fait halte à Maricourt pour une pause-déjeuner dans le Jardin de Félicie.

Une partie des marcheurs qui profitent de ce repos bien mérité !
Félicitons la dame qui se trouve sur la gauche de la photo ci-dessus. Elle est affectueusement surnommée « Mamy » et est âgée de 88 ans. Notons que malgré la forte chaleur elle a suivi l’équipe d’intendance tout au long de la journée.(4)

Après s’être restaurés et reposés sous les frondaisons de ce magnifique jardin, les marcheurs remonteront, par l’ancienne « halte de Mametz » vers l’ancien point de résistance 71-110.

La « Halte de Mametz » a fait l’objet, en décembre 1914, de combats acharnés durant lesquels les régiments français, et notamment le Régiment d’Infanterie Coloniale du Maroc, ont perdu des centaines d’hommes dont beaucoup reposent encore sur les pentes de ce secteur.

A ce propos, en mai dernier des fouilles entreprises par les Britanniques, fouilles qui avaient pour but de retrouver un de leurs « lance-flamme géant » ; ont mis au jour les corps de deux soldats français. Sur l’un d’eux a été retrouvé ce bouton représentant une ancre de marine :

Partant de ce objet, quelques recherches dans les pages de différents JMO m’ont permis d’alléguer qu’il s’agissait d’un des soldats disparus du Régiment d’Infanterie Coloniale du Maroc.

Ci-dessus, sur cette photo prise au mois d’avril 2010, on peut apercevoir dans le fond le village de Mametz qui était aux mains des Allemands lors des attaques de décembre. La halte est située sous la flèche. On ne peut la voir depuis cet endroit mais elle se trouve dans le fond le long de l’actuelle route Albert-Péronne. Les corps des deux soldats ont été retrouvés à peu près à l’endroit où j’ai prit cette photo.

Le courage manifesté par les hommes de le RICM durant les journées des 17, 18 et 21 décembre 1914, a valu au régiment sa première citation à l’ordre de l’Armée. Et bien d’autres suivront !

Retour au lieu-dit « Bois français » pour observer de près un trou creusé par l’explosion de mine début 1915. La marche s’est ensuite poursuivie vers le lieu-dit « Tambour Duclos ».

Et au bout des 26 km du parcours, dont une bonne partie s’est effectuée sous un soleil généreux mais accablant, les courageux marcheurs ont ensuite rejoint La Boisselle en passant par la « Grande Mine » aussi appelée « Lochnagar Crater ».

Au nom de Monsieur André Belle (qui est à l’initiative de cette marche et de son parcours) de Madame Llewellyn (dont le travail de recherche est à souligner) et en mon nom, un grand merci à tous les marcheurs !

(1) Fondateurs de l’Association « Mémoire du Centenaire 14-18 en Picardie »
(2) Offerte par la Somme Remembrance Association représentée par notre ami François Bergez
(3) Lien vers l’article et la liste des hommes du 403e tués lors de cette attaque.
(4) Ma maman 😉

Une réflexion au sujet de « Sur les traces des soldats français dans la Somme »

  1. Reçu de Sophie en date du 15/08/2010 : Bonjour Anne

    Merci pour ce superbe reportage sur la marche souvenir du 4 juillet dernier. Je suis déçue de n’avoir pu être des vôtres mais ce n’est que partie remise.
    Félicitations à toute l’équipe pour ce travail de mémoire en hommage aux soldats français.
    A bientôt dans la Somme
    Amicalement
    Sophie

    de Yves en date du 26/08/2010 : comme j’aurai aimé être avec vous mes amitiés à tous et à toi pour ton merveilleux blog Yves

    de Mr Guy Meisonnave en date du 10/12/2010 : Bonjour, je cherche des renseignements sur Laurent LARTIGAU, frère de ma grand-mère maternelle, tué dans la Somme (14-18) Où ?,Quand ? Je ne sais rien de lui. C’était un Landais. J’ai appris son existance tout récemment, on ne parlait pas dans la famille… or j’écris pour mes enfants l’histoire familiale. Où puis-je le retrouver, sur quel site, je cherche depuis plusieurs jours. MERCI de m’aider. Salutations.

    de Mr Guy Meisonnave en date du 16/01/2011 : Bonjour, je cherche toujours Laurent LARTIGAU, tué en 14-18, où ? quand ? je ne sais pas, je viens d’apprendre qu’il serait enterré à LIBERCOURT ( 62 ). Attention, son prénom Laurent peut ne pas correspondre à son prénom de l’état civil, ça arrive et complique les recherches. Il était né dans les Landes. je continue de chercher. Merci de m’aider.

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