Les opérations dans le secteur du Bois Nawé

Le rapport du JMO est très succint au sujet des opérations et combats livrés par le régiment dans ce secteur de Verdun où il ne restera que 17 jours.

Le 28 mai, après la pénible relève de la nuit précédente et à peine installé dans la tranchée des Caurettes, en soirée le 2e bataillon subit un violent bombardement suivi de fusillades, tirs de mitrailleuses et combat à la grenade.

29 mai

Des patrouilles inspectent le fond en avant du boyau Rémy et l’une d’elle, pénètrant dans la carrière d’Haudromont, constate que celle-ci est inoccupée par l’ennemi.  D’autres patrouilles explorent aussi la tranchée des Lisières sur une distance de 50 m.

30 mai

A 3h 30 du matin le 410e effectue un coup de main sur la partie de la tranchée des Lisières occupée par les Allemands.  Il est appuyé par un groupe de grenadiers et un groupe de protection placés sous le commandement des Sous-Lieutenants Dupré et Aubry.  La liaison avec le 410 est établie, dans cette tranchée, à 5h du matin.

Dans la journée qui suit, les hommes subiront des bombardements systématiques et continus qui ont pour conséquence de démolir les organisations et, surtout, il y aura d’importantes pertes humaines.

Les jours suivant seront ponctués de bombardements (dans le sous-secteur) et on note, le 2 juin, un combat à la grenade sur un poste d’écoute du 2e bataillon.

4 juin

Grosse émotion au sein de la 10e Cie qui surprend un groupe d’Allemands dans ses lignes. Mais les guetteurs veillent, ils abattent deux hommes et la compagnie fait 8 prisonniers parmi lesquels un officier et un feldwebel (sergent).

5 juin

Les bombardements continuent et on note des mouvements de troupes ennemies.

7 juin

Un observatoire est installé près du PC du 3e bataillon qui est, en permanence, occupé par un sous-officier. A 20h15 on signale une centaine d’ennemis dans le ravin de la Dame remontant la pente Est du Bois de Nawé.

 

Le 8 juin de nombreuses attaques françaises en dehors du secteur et sur la droite de ce dernier ainsi que de nombreux mouvements de troupes ennemies sont à nouveau signalés.

Extrait du JMO :


8 juin

1er bataillon – Attaque allemande précédée d’un violent bombardement sur les ouvrages de Thiaumont où l’ennemi prend pied. Le 1er bataillon reçoit l’ordre de contre-attaquer. Le 2e et 4e Cies chassent l’ennemi de ces ouvrages et s’installent dans la tranchée Wagner. Liaison avec le 347e à droite et le 293e à gauche. Quelques prisonniers.

Cette contre-attaque nous coute 17 tués et 41 blessés.

Le 1er bataillon passe sous les ordres du commandant Masseron commandant le 293e et reçoit l’ordre de gagner du terrain en avant de la tranchée Wagner. La 1er Cie va s’établir au Sud de l’abri 118 et construit une tranchée à 100 m au N.E. de la tranchée Wagner.

10 juin

2e et 3e bataillon – A 2h15 une troupe ennemie forte d’un cinquantaine d’hommes est signalée dans le ravin de la Couleuvre par un poste avancé. Cette troupe accueillie par un feu violent se disperse sans riposter. Une patrouille ramène dans nos lignes un Allemand grièvement blessé.

1er bataillon – La 1ère Cie construit une tranchée à 250 m au N.E. de la tranchée Wagner face à la ferme de Thiaumont.

Vers 15 heures, la 3e Cie (de réserve) se porte sur la Crête de Thiaumont – Ravin de la Dame – Corne S.E. du bois de Nawé. Reconnaissance sur la ferme de Thiaumont.

11 juin

2e et 3e bataillons – Reconnaissance par les officiers du 65e dans la nuit du 11 au 12

1er bataillon – Violent bombardement . La 3e Cie et un peloton de la 4e Cie reviennent en réserve. Une section de la 1ère Cie de mitrailleuse est portée sur la ligne de la 1ère Cie.

12 juin

1er bataillon – Violent bombardement vers 3h30 sur le secteur du 1er bataillon.  A 5h45 attaque ennemie en vagues serrées sur le 49e bataillon de Chasseurs, attaque moins dense sur le front du bataillon. Notre feu d’infanterie l’arrête.

L’artillerie françaises disperse des rassemblements ennemis dans le Ravin de la Dame. La 3e Cie renforce la 1ère ligne.

2e et 3e Cie – Capture d’un Allemand (minenwerfer)

Relève du 1er bataillon par le 120e Bataillon de Chasseurs. Les compagnies relevées vont cantonner de l’autre côté de la Meuse, à Nixéville- Blercourt, au S.O. de Verdun. 

13 juin 

1er bataillon – Un bataillon du 39e R.I. contre-attaque devant le front du 1er bataillon du 403e et se cramponne au sol à 100 m en avant.

Relève du 1er bataillon par une compagnie du 137e et une section de mitrailleuses. Le 1er bataillon va cantonner à Mixéville.

2e et 3e bataillon – capture de trois Allemands. Le 65e R.I. ayant été désigné pour occuper d’autres emplacements que le sous-secteur Nord, le 9e et 11e Cies du 403e sont relevées dans la nuit du 13 au 14 par deux compagnies du 160e Bataillon de Chasseurs.


Dans la nuit du 14 au 15 juin,  tout le reste du régiment est relevé par le 120e Bataillon de Chasseurs. Les compagnies vont cantonner de l’autre côté de la Meuse, à Nixéville- Blercourt, au S.O. de Verdun.

Ce court séjour dans le secteur du Bois de Nawé (dans le sous-secteur Nord pour les 2e et 3e Bts et devant l’ouvrage de Thiaumont pour le 1er Bt) aura tout de même coûté la vie à 97 hommes. Il y aura 380 blessés et 42 disparus.

Au 1er bataillon il y aura 52 tués (dont les sous-lieutenants Dehaus et Guisier) , 37  disparus et 159 blessés (dont les sous-lieutenants Guimas, Noblesse et Cuvinot).

Aux 2e, 3e et CHR il y aura 45 tués (parmi lesquels le sous-lieutenant Cheron). 5 disparus qui appartiennent aux 2e et 3e bataillons qui comptent aussi 221 blessés (dont les sous-lieutenant Martin, Chaplain, Bouteille, Dupré, Alligrot et Cuny).

Dachau est libéré mais …

[C’est afin de respecter la chronologie du témoignage de cette libération que je fais remonter cet article paru en janvier 2009 ]

Le camp de Dachau a été libéré le 29 avril 1945, les survivants vivent dans la hâte du retour au foyer mais après le joug nazi, c’est le typhus qui tient les hommes prisonniers ! Ils ont été mis en quarantaine et le retour à la maison semble s’éloigner. Les hommes ressentent très mal cet état de fait car pour eux, mis à part les barbelés qui ne sont plus électrifiés et quelques améliorations du côté de la nourriture et des soins, rien ne semble avoir changé.

Le 10 mai, sur un bout de papier qu’il fera parvenir à sa mère via la croix-rouge, mon père écrit ce mot en forme de supplique :

Dachau le 10-5-45 Bien chère maman et chers tous, Voici ma 3e lettre le temps passe et rien ne se décide ici. Nous sommes en quarantaine ce qui retarde le rapatriement. Il faut que toutes les familles des prisonniers réclament auprès du gouvernement pour hâter le retour sinon dans 2 mois nous serons encore ici. Et il n’y fait pas gai car a part la nourriture qui est améliorée nous vivons dans les mêmes conditions que pendant la captivité. Nous couchons 3 par lit tu te rends compte et on compte jusque 500 hommes sur 144m2 !! Evidemment ça se dégage tout doucement mais pour nous ce qui compte c’est le chez soi. Alors insistez tous pour que le gouvernement emploie les mesures qu’il faut pour hâter le retour. Si tu sais m’envoyer un colis par la croix-rouge fais le, du linge pas besoin à moins que mouchoirs et une chemise, le reste ça va. Un peu de cigarettes et des « machins po mougné ». Nous sommes ici au régime lacté ce qui n’est pas gai parce que certains ont la dysenterie. A part ça tout va bien j’ai un peu de bronchite. Et chez nous ? J’espère que ça va. Ne vous en faites le temps passera vite et on sera vite là mais encore une fois faites ce qu’il faut pour le retour. Je termine sans avoir presque rien dit ce dont je m’excuse. Bien des amitiés chez Mme Degeimbre, à Gilberte, Andrée et Georges. Milles baisers aux petits et pour toi maman aussi Jef Nénette Jean. Arthur

Heureusement pour lui, mon père a été évacué quelques jours plus tard. À son arrivée dans son village natal de Beauraing, il pesait moins de 40kg. Et il venait**seulement** de subir entre 12 et 14 mois de détention dont 10 passés en camp de concentration…(*)

Sur ce détail on peut lire numéro du bloc où il se trouvait et le numéro qui lui avait été attribué à son arrivée au camp de Dachau  (**)

Mon père est arrivé à Dachau quelques jours avant la libération du camp. A l’arrivée depuis Saal-an-der-Donau, sur les 80 hommes de son wagon, on a seulement relevé 4 survivants !


(*) Il a été arrêté aux environs d’avril- mai 1944 et, après un très bref passage dans les prisons de Dinant et Namur, transféré à la prison de St Gilles. Selon les documents allemands, il fut déporté vers l’Allemagne le 21 juillet 1944

(**) Au camp de Flossenbürg il portait le matricule 44723